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Les NOUVELLES des Mureaux
Les NOUVELLES des Mureaux
9 novembre 2010

affaire baby-loup : où est la vérité ?

Affaire baby-loup : c’est une affaire de l’arroseur arrosé 

   

A Mantes-la-Jolie, le 8 novembre, le Conseil des Prudhommes de Mantes-la-Jolie aurait pu être dépassé par l’ampleur (nationale) de l’affaire Baby-Loup de Chanteloup-les-Vignes (78). Tout le gotha politique, médiatique et juridique était là pour cette affaire de licenciement.  Les autres affaires (par exemple, un contentieux entre un clerc de notaire et une officine notariale) sont rapidement oubliées dans une atmosphère de cour d’assises…

Les choses sérieuses commencent avec Baby-Loup devant une pléthore de médias nationaux. Avant la mise en délibération du 13 décembre 2010, voici un récit des débats.

Le débat a été retardé pour que le calme, les personnalités (la philosophe Elisabeth Badinter, le député PS Manuel Valls… et Jeannette Bougrab la présidente de la Halde) et la plaignante principale, Mme Fatima Afif s’installent. Mme Afif est arrivée, accompagnée d’un groupe de supporteurs. Mais ce n’était rien comparé au nombre de personnes venues pour l’affaire Baby-Loup, synonyme de laïcité.

Manuel Valls, député PS présent à l’audience de Mantes-La-Jolie

"On n’est pas en Afghanistan !"...

Fatima est allée s’asseoir entourée de ses ami(e)s. Quelqu’un de la salle s’est exclamé : « On n’est pas en Afghanistan ! » Le ton était donné.

Deux avocats - Me Louis Gayon et Me Richard Malka-, pour la crèche Baby-Loup et l’avocate de Fatima Afif, Maître Aïcha Mejri s’affrontent sur l’affaire. Des témoins sont appelés de part et d’autre : une dizaine au total. Ces témoins sont immédiatement mis en quarantaine pour qu’ils ne soient pas influencés par les plaidoiries des uns et des autres.

Commençons par l’avocate de Mme Afif. Pour Maître Aïcha Mejri, le licenciement abusif est caractérisé par un règlement interne qui n’a pas lieu d’être dans un établissement privé. En outre, la discrimination du fait d’une liberté fondamentale (la religion musulmane) a été établie par la Halde (janvier 2010). Mais, comme la présidente actuelle de la Halde a rouvert le dossier, cet argument devenait plus difficilement recevable.

Jeannette Bougrab Elisabeth Badinter à Mantes-La-Jolie

Faute grave ou pas ?

Sur les faits, selon l’avocate Aïcha Mejri, il n’y a pas de faute grave de la part de Fatima Afif et par conséquent elle demande la nullité de ce licenciement qui serait le fruit d’une manipulation grossière par Baby-Loup qui chercherait à « monter un dossier sur le dos de Mme Afif ». En somme, Mme Afif aurait toujours respecté les règles (sauf que les règles ont changé pendant l’absence de Mme Afif en raison de son congé prolongée entre 2003 et 2008). Dans la crèche, sa cliente était assimilée cadre. Enfin, elle n’aurait jamais violenté, ni porté danger à quiconque notamment dans les deux jours de décembre 2008 (9 et 10). Sur ce point, les témoignages étaient décisifs. Convaincants ? On verra l’avis des membres du Conseil de Prudhommes. L’avocate Mejri a surpris car elle n’a pas demandé la réintégration de Mme Afif à son poste (au cas où la thèse d’absence de faute grave s’avèrerait vraisemblable). (1)

Mme Afif aurait porté le voile sur son lieu de travail même avant son congé, mais de façon irrégulière. A son retour, elle voulait le porter tout le temps. Ce serait cela la source du problème (un film antérieur au congé, où l’on voit une Mme Afif voilée pendant la présentation générale des activités de la crèche, est présenté comme pièce du dossier).

« Que nenni » s’exclame alors Me Guyon. Pour lui, cette vidéo serait un film publicitaire. On peut constater que Mme Afif porte le voile avant de rentrer à la crèche et, qu’après, elle l’enlève. Elle aurait porté le voile à l’insu de la direction , ce fait lui aurait valu une "lettre d’observation datée du 21 mars 2001". Pour Baby-Loup, Mme Afif n’avait pas à porter le voile pendant le service.

Pour Me Guyon, Mme Afif voulait rompre le contrat la liant avec Baby-Loup en prétextant une affaire de  port de voile. Mme Afif aurait initié, elle-même, le processus de licenciement dans une lettre du 15 octobre 2008. Dans cette lettre, elle aurait demandé à rencontrer les responsables de Baby-Loup pour évoquer « une rupture à l’amiable ». Le 5 novembre la réunion a eu lieu. Mais les choses se seraient corsées car les indemnités espérées par Mme Afif n’auraient pas été à la hauteur de ses ambitions… Sur ce point, Mme Afif n’aurait pas tendu la main et même aujourd’hui, elle est intransigeante. « Elle ne fera pas de concessions » termine Me Guyon.

Mantes-la-Jolie, lieu d’un débat symbolique pour la France

L’affaire Baby-Loup a pris une tournure nationale lorsque la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité a considéré ce licenciement comme un acte de « discrimination religieuse ». A Mantes-La-Jolie, lieu symbolique d’un autre grand débat avant la conversion de Henri IV, en voyant les médias et des personnalités politiques et philosophiques, la preuve était fournie : LA POLITIQUE (au sens classique du terme) s’est emparée du dossier. Cependant, revenons à l’aspect juridique de cette affaire.

Le conseil des prudhommes à Mantes-la-Jolie

En outre, et de manière convaincante, Me Guyon a démontré que Mme Afif « était une laïque en 2002 » car elle a fait part dans une lettre à son personnel de la nécessité absolue de garder la crèche neutre vis-à-vis des tentations de montrer les convictions religieuses de chacun(e). Point par point, Me Guyon a démonté les arguments de son adversaire du moment, Me Aïcha Mejri. Le film était publicitaire. La crèche est un équipement quasi-public, donc la laïcité s’applique. Et surtout, l’instrumentalisation est le fait de Mme Afif : elle a ouvert la boite de pandore en voulant mettre le maximum de poids juridique à son avantage. En plus, elle a commis une faute grave les 9 et 10 décembre 2008 : elle aurait menacé la directrice (« Tu est morte, Baby-Loup c’est fini ! ») et elle aurait commis un acte d’insubordination. Enfin, sa mise à pied à titre conservatoire était nécessaire pour le bon fonctionnement de Baby-Loup.

En réalité, Fatima Afif  a peut-être perdu sa crédibilité en demandant le maximum d’indemnités (presque 80.000 euros)  d’une crèche « pas comme les autres ». Or, Baby-Loup est une crèche modèle et novatrice qui remplit, par conséquent, un service d’intérêt général pour Chanteloup-les-Vignes (78).

En conclusion, c’est une affaire de l’arroseur arrosé. Mme Afif a sans doute confondu intérêt privé (son intérêt à elle) et l’intérêt général. N’a-t-elle pas converti son licenciement en un débat de société « pour ou contre le port du voile dans une crèche associative » ? De cette question, la laïcité doit ressortir renforcée !

Par Rodrigo Acosta
Post-scriptum

Notes de bas de page

(1) La suite juridique :

Les membres du collège du Conseil des Prudhommes auront du mal à trouver une réponse juridique adéquate et sereine.  D’appel en appel on risque de voir aboutir cette affaire en Cassation. Rendez-vous dans six ans en Cassation ? Et ensuite à la cour européenne des Droits de l’Homme ?

Un expert prud’hommal consulté a donné son avis : il y aurait faute grave pour Mme Afif parce que si la plaignante avait demandé la nullité du licenciement, elle devrait être réintégrée son poste (avec voile ou sans voile). En réalité, il y a eu « erreur de procédure de licenciement » mais l’avocate de Mme Afif a mal plaidé…

Jugement le 13 décembre 2010.

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